Pendant plusieurs années, le Service de police de la Ville de Montréal a soutenu que le Collectif opposé à la brutalité policière (COBP) était l’un des rares groupes qui refusait de communiquer le trajet de ses manifestations aux autorités policières.
Ainsi, dans un communiqué de presse diffusé le 16 mars 2009, le SPVM alléguait que les organisateurs de la manifestation contre la brutalité policière du COBP survenue la veille avaient refusés de fournir leur itinéraire « contrairement à la très grande majorité des manifestations ». (1)
L’année suivante, dans un communiqué de presse diffusé le 18 mars 2010, le SPVM réitérait que les organisateurs de la manifestation du COBP avaient refusé de fournir leur itinéraire « contrairement à la très grande majorité des manifestations ». (2)
Puis, dans un article publié sur Cyberpresse le 16 mars 2011, on pouvait lire ceci : « Selon la police, le COBP est le seul organisme à refuser de fournir aux policiers l'itinéraire de la marche ». (3)
Notons qu’à ce moment-là, il n’existait aucune obligation légale de la part des organisateurs de manifs de communiquer quelque information que ce soit à la police.
Le 4 avril 2012, un militant de la CRAP a adressé une demande d’accès à l’information au SPVM.
Dans sa demande, le militant demandait dans un premier temps au SPVM de lui dire combien de services d’ordre a-t-il géré dans le cadre de manifestations en 2009, 2010 et 2011.
Dans un second temps, le militant voulait savoir combien de fois les organisateurs des manifestations tenues durant ces trois années avaient-ils communiqués le trajet de leur manifestation au SPVM.
À la fin du moi de mai, le SPVM n’avait toujours pas prit position relativement à la demande d’accès à l’information, obligeant ainsi le militant à s’adresser directement à la Commission d’accès à l’information.
Notons que l’article 50 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (ci-après la loi sur l’accès) oblige les responsables de l’accès à l’information à « motiver tout refus de donner communication d'un renseignement et indiquer la disposition de la loi sur laquelle ce refus s'appuie ».
Ce n’est que le 22 juin 2012 que le SPVM a finalement répondu en bonne et due forme à la demande d’accès.
Le SPVM a alors écrit au militant qu’il refusait de lui donner satisfaction sous le prétexte que « la communication des renseignements demandés quant aux manifestations et aux services d’ordre pour les années 2009 à 2011 serait susceptible de nuire à des procédures judiciaires présentement en cours ».
Ainsi, le SPVM invoquait l’article 28 de la Loi sur l’accès pour refuser l’accès aux informations demandées.
La position du SPVM était étonnante, dans la mesure où ce corps policier n’avait jamais hésité, ces dernières années, à communiquer de son propre chef des informations aux représentants des médias laissant clairement croire que l’écrasante majorité des organisateurs de manifestations lui communiquaient leur parcours, comme on l’a vu ci-haut.
Curieusement, maintenant qu’un militant demandait à obtenir des chiffres précis, le SPVM choisissait de se défiler en brandissant le fameux article 28 de la Loi sur l’accès, en invoquant d’obscures « procédures judiciaires présentement en cours ».
Puis, dans une lettre datée du 30 juillet 2012, le SPVM a fait volte-face, révisant ainsi complètement sa position.
« Contrairement à ce que laissait sous-entendre notre réponse du 22 juin 2012, il n’existe aucun document colligeant le nombre d’itinéraires transmis au SPVM préalablement aux manifestations en 2009, 2010 et 2011 », a écrit le responsable de l’accès à l’information au SPVM.
Le SPVM parlait donc à travers son casque anti-émeute lorsqu’il affirmait que le COBP était le seul groupe qui ne lui communiquait pas le trajet de ses manifestations, ou encore lorsqu’il prétendait deux fois plutôt qu’une qu’il se faisait communiquer les itinéraires dans « la très grande majorité des manifestations ».
Raison de plus pour ne pas prendre pour argent comptant les nombreuses affirmations et allégations véhiculées par le SPVM à l’égard des groupes qui critiquent les abus policiers.
(1) http://www.spvm.qc.ca/FR/documentation/3_1_2_communiques.asp?noComm=604
(2) http://www.spvm.qc.ca/fr/documentation/3_1_2_communiques.asp?noComm=690