Le mémoire de la CRAP, version non-censurée

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L’enquête du coroner André Perreault sur les causes et circonstances du décès de Fredy Villanueva est maintenant rendue à la dernière étape, soit celle des plaidoiries des parties intéressées.
 
Au début de la première journée d’audience des plaidoiries, le 7 février 2011, l’avocat de la Ville de Montréal et de son Service de police, Me Pierre-Yves Boisvert, s’est adressé au coroner Perreault pour demander la censure de certains passages du mémoire de la CRAP.
 
Les passages en question portent sur les mécanismes de sécurité de l’étui à pistolet de l’agent Jean-Loup Lapointe. On sait que la Ville de Montréal et la Fraternité des policiers ont tous deux intentés des recours devant la cour supérieure afin d’empêcher le coroner Perreault d’examiner à fond la question des mécanismes de sécurité de l’étui à pistolet.
 
Le recours intenté par le syndicat de l’agent Lapointe va encore plus loin que la requête de la Ville de Montréal, puisqu’il demande à la cour supérieure de prononcer une ordonnance interdisant « à quiconque de publier ou diffuser de quelque manière que ce soit et sur quelque support que ce soit quels sont les mécanismes de sécurité dont sont dotés les étuis utilisés par le Service de police de la Ville de Montréal et quel en est le mode de fonctionnement et d’ordonner que le jugement rendu en l’instance, ou à tout le moins ses conclusions, et particulièrement sa conclusion injonctive, soit publié dans les principaux médias écrits et électroniques. »
 
L’examen des mesures de sécurité de l’étui à pistolet de l’agent Lapointe est pourtant essentiel pour faire toute la lumière sur les causes et circonstances du jeune Fredy Villanueva, ce qui est d’ailleurs la raison d’être de cette enquête publique. En effet, l’agent Lapointe a invoqué sa peur de se faire désarmer pour justifier sa décision de faire feu sur Fredy Villanueva et deux de ses amis, soit Jeffrey Sagor-Metellus et Denis Meas.
 
De plus, l’agent Lapointe a également soutenu qu’il était facile de se faire désarmer. La CRAP est d’avis qu’il s’agit-là d’un grossier mensonge de la part de l’agent Lapointe. La seule façon de démontrer la fausseté de l’affirmation de l’agent Lapointe est de procéder à un examen des mécanismes de sécurité qui protègent son étui à pistolet contre toute tentative de désarmement.
 
Voilà pourquoi l’employeur et le syndicat de l’agent Lapointe font des pieds et des mains pour cacher cette vérité qui va à l’encontre des intérêts de celui qui a abattu Fredy Villanueva.
 
Durant son témoignage du 3 février 2010, l’agent Lapointe a offert une description sommaire des mécanismes de sécurité de son étui qui contient l’arme qui a servi à tuer Fredy Villanueva. Il a décrit le fonctionnement de ces mécanismes en réponse à une question du procureur du coroner, Me François Daviault. L’agent Lapointe a même hésité à répondre à la question, en disant qu’il n’était pas sûr s’il pouvait le faire à cause de motifs de sécurité. Or, les avocats qui représentent les intérêts des policiers sont restés assis et n’ont rien dit. Devant les hésitations du policier, le coroner est alors intervenu pour lui demander de répondre à la question de Me Daviault. Encore une fois, les avocats qui représentent les intérêts des policiers sont restés assis et n’ont rien dit.
 
Lorsque l’agent Lapointe a répondu à la question, les avocats qui représentent les intérêts des policiers ont omis de demander au coroner de prononcer une ordonnance de non-publication. Alors, tant pis pour eux s’ils ont raté à la fois une occasion de s’objecter et de demander une ordonnance de non-publication. Dans ce contexte, la CRAP n’avait aucune raison de s’abstenir d’inclure dans son mémoire cette fameuse réponse donnée par l’agent Lapointe le 3 février, ainsi que d’autres extraits de témoignage se rapportant à la question des mesures de sécurité de l’étui à pistolet.
 
Durant l’audience du 7 février dernier, Me Boisvert a appuyé sa demande de censure en prétendant que le mémoire de la CRAP contenait des informations dérogeant aux ordonnances rendues par le coroner. En fait, le coroner a lui-même convenu que le mémoire de la CRAP ne contrevient à aucune des ordonnances de non-publication qu’il a prononcé au cours de cette longue enquête.  
 
Le coroner a répondu à la demande de Boisvert en déclarant qu’il n’allait pas rendre d’ordonnance rétroactive. Mais il a aussi indiqué qu’il allait quand même censurer certains passages du mémoire de la CRAP, soit la page 45, une bonne partie de la page 46 et une ligne sur la page 48, qui traitent des mesures de sécurité de l’étui à pistolet.
 
Le coroner a expliqué sa décision en rappelant que la cour supérieure doit entendre des requêtes de la Ville de Montréal et de la Fraternité des policiers, qui veulent empêcher que la question des mesures de sécurité de l’étui à pistolet soit examinée au cours de l’enquête. Dans ce contexte, permettre à la CRAP de faire des représentations sur ce sujet avant que la cour supérieure ne décide s’il peut examiner cette question reviendrait à prendre position dans ce débat qui va être tranché par une autre instance.
 
Conséquemment, le procureur Daviault a remis aux médias la version censurée du mémoire de la CRAP. Le coroner a toutefois indiqué qu’il n’avait aucun contrôle sur l’utilisation que la CRAP allait faire de son mémoire à l’extérieur de la salle d’audience.
 
C’est pourquoi nous invitons tous ceux et celles qui veulent connaître toute la vérité sur les causes et circonstances du décès de Fredy Villanueva à prendre connaissance de la version non-censurée du mémoire de la CRAP.
 
Ne laissons pas les ennemis de la transparence et de la vérité avoir le dernier mot !